1. Cadre légal de la consultation annuelle sur les conditions de travail et attendus du CSE sur l’accompagnement par un par expert
Le législateur a structuré les consultations annuelles des CSE autour de 3 temps. La consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi est l’un de ces temps.
Le législateur offre par ailleurs la possibilité aux élus du CSE de se faire accompagner par un expert dans le cadre de ces consultations. Pour autant, il ne précise pas le contenu de cet accompagnement ; charge donc à l’instance de les définir.
Par référence à l’accompagnement sur la consultation annuelle relative à la situation économique de l’entreprise (qui donne chaque année un état des lieux sur ce périmètre au travers un certain nombre d’indicateurs : chiffre d’affaires, ebitda,..), il est fréquent que nos donneurs d’ordre nous demande un travail similaire sur le champ des conditions de travail.
Autrement dit, il s’agirait pour nous de fournir un état des lieux annuel des conditions de travail dans leur globalité grâce à l’analyse d’un certain nombre d’indicateurs chiffrés.
Or cette attente, ne nous apparait pas réaliste sur le plan méthodologique tant le périmètre des conditions est étendu ; sans compter les impacts d’une telle option sur le coût de la mission.
2. Contenu et limites d’une une mission qui chercherait à fournir une vision globale quantifiée des conditions de travail
Etude des indicateurs sociaux
Analyser les conditions de travail de façon globale nécessite tout d’abord de suivre un certain nombre d’indicateurs sociaux du type absentéisme ou turnover. Pour autant, il s’agit là de données indirectes qui peuvent avoir un sens ou non du point de vue des conditions de travail. En effet, la dégradation des indicateurs sociaux n’est pas systématiquement en lien avec une dégradation des conditions de travail. De même, des indicateurs sociaux positifs ne traduisent pas nécessairement des conditions de travail équilibrées.
A titre d’exemples :
- Un turnover élevé peut-être le signe d’une dégradation des conditions de travail, mais également d’un marché du travail en tension favorisant les mobilités interentreprises ;
- Des troubles psychosociaux sérieux (burn out, suicide,..) peuvent apparaître dans des organisations qui présentent des indicateurs sociaux positifs.
Aussi si l’étude des indicateurs sociaux est nécessaire pour identifier des tendances annuelles, elle ne peut pas être considérée comme suffisante pour illustrer les conditions de travail. Elle doit donc être complétée par des analyses qui font le lien avec la réalité des situations de travail.
Etude des données santé / sécurité
Analyser les conditions de travail de façon globale nécessite également de suivre les indicateurs santé / sécurité du bilan social, fréquence et gravité des accidents notamment. Le suivi de ces données s’impose à toutes les entreprises quelque soit la nature de leur activité. Malheureusement, ces obligations ont été définies par le législateur avec la vision d’une France industrielle, très éloignée des conditions de travail actuelles (tertiarisation et numérisation de l’économie, émergence des risques psychosociaux).
Aussi, les indicateurs santé / sécurité obligatoires ne permettent pas nécessairement de caractériser les conditions de travail « modernes » que l’on trouve dans notamment dans les organisations en mode projet, le recours accru au télétravail, le travail en open space….
Dans ces situations principalement non industrielles, ils permettent simplement de valider que l’organisation étudiée, comme toutes les entreprises de son secteur n’est pas sujette à une forte accidentologie.
Dans une vision idéalisée, il conviendrait donc de concevoir des indicateurs spécifiques pour illustrer les conditions de travail dans ces organisations.
Quantification des risques psychosociaux
Analyser les conditions de travail de façon globale nécessite enfin d’évaluer les risques psychosociaux dans l’entreprise, car ils constituent les risques majeurs auxquels les salariés sont exposés dans une organisation moderne.
Ce travail d’évaluation implique :
- la passation pour l’ensemble du personnel d’un questionnaire ad hoc ;
- la réalisation d’entretiens et d’observations qualitatives, permettant de préciser la réalité des situations de travail (puis de proposer des mesures de prévention).
L’évaluation des risques psychosociaux nous apparait donc comme indispensable pour qualifier les conditions de travail dans une organisation.
Notons cependant qu’un questionnaire RPS standard donne une vision globale de la situation psychosociale mais ne traite pas de l’ensemble des sujets « conditions de travail ». Certains d’entre eux peuvent d’ailleurs nécessiter le recours à un questionnaire spécifique : télétravail, open space, mode projet, violences internes et/ou externes, TMS, risque routier.
Aussi, il serait faux de penser que la mise en œuvre d’une enquête RPS fournirait une vision exhaustive des conditions de travail dans une organisation.
3. Quel contenu pour une mission utile ?
Pour conclure, étant donné la diversité des sujets à traiter et des méthodes d’investigation à mettre en œuvre sur le périmètre conditions de travail, nous considérons qu’il est n’est pas possible de fournir une cartographie globale et annuelle des conditions de travail dans l’entreprise.
Dans le cadre de la consultation annuelle sur les conditions de travail, il convient donc de privilégier une approche ciblée des sujets à traiter.
Les investigations à mener devant être dirigées par l’actualité de l’année et le niveau de maturité de l’organisation sur le sujet des conditions de travail.